Émil Lavoie
Le projet de loi 15 visant à rendre le système de santé et de services sociaux plus efficace fait débat chez les travailleurs de la santé. Plusieurs craignent que la nouvelle réforme amplifie les difficultés actuelles, tandis que d’autres voient d’un bon œil les changements annoncés par le ministre de la Santé, Christian Dubé.
« Il y a 300 pages et 1200 articles, donc automatiquement le projet de loi va traiter les composantes du système de santé de A jusqu’à Z », a mentionné la cheffe du département de pharmacie du CIUSSS du Saguenay-Lac-Saint-Jean, Isabelle Jean.
Mme Jean souligne que l’imposant document est une « révision complète de l’accès aux soins et services en séparant l’opérationnel du ministère », même si elle a quelques réticences à l’égard de l’application concrète des diverses mesures proposées par M. Dubé.
Le projet est toutefois remis en question et jugé « trop gros et trop peu personnalisé », alerte la coordonnatrice d’activité clinique au CISSS de l’Outaouais, Diane Audette. La femme de plus d’une quarantaine d’années d’expérience dans le domaine de la santé craint que l’instauration de Santé Québec centralise davantage la gestion et que les employés ne soient « que des numéros ».
Des défis à la tonne
La pénurie de main-d’œuvre et le manque de gestion de proximité sont des enjeux majeurs exposés par les deux femmes. De nombreux articles du projet de réforme sont dédiés à ces aspects. Cependant, plusieurs défis se dressent entre la théorie et la réalité.
« Pour arriver à faire des changements ça prend du monde mobilisé et motivé, ça prend des gens prêts à mettre énormément d’efforts pour effectuer les virages, mais au même moment, on a besoin de ces gens sur le terrain clinique », a précisé Mme Jean, pharmacienne de formation.
« Il y a toujours une couleur locale qu’il faut tenir en compte lorsque surviennent des changements et j’espère que la réforme actuelle en tiendra compte », ajoute-t-elle.
De plus, le manque de personnel entraine des mesures contraignantes comme les heures supplémentaires obligatoires. Ces dernières peuvent « décourager le personnel soignant et entrainer un taux d’absentéisme élevé », signale Mme Audette. « Ce n’est pas un très bon système d’horaire et la pénurie nous force à faire du (TSO) », a-t-elle déclaré.
La réforme de la dernière chance?
Pour Mme Jean, la certitude de futures réformes ne fait aucun doute. Elle évoque les besoins de plus en importants pour la population vieillissante, la complexité des traitements et l’évolution de la science et des technologies comme étant incontournables.